Rétro-futurisme : une tendance has been ?
« En l’an 2000 on ira à l’école en soucoupe volante ». C’est ce que j’avais répondu, la mine réjouie, à mon institutrice en CM2 à la fin des années 70. Elle avait demandé à la classe comment nous imaginions l’an 2000. Sans le savoir nous étions tous hyper technophiles. Les scandales des années 80 de la vache folle, du sang contaminé, et l’apothéose, le drame de la centrale nucléaire de Tchernobyl en 1987, ne s’étaient pas encore produits. Nous avions une foi inconditionnelle dans la technique. Et dans leurs représentants : les scientifiques en blouse blanche. Le cinéma participait de cette technophilie. Les films de série B des années 50-60 pullulaient de références bienveillantes à l’égard de la technique. « Planète interdite » et Robby son emblématique robot, en fut un marqueur puissant. Et puis, le doute s’est installé. On a fini par dissocier progrès et progrès technique. On avait compris que la technique ne suffirait plus à elle seule pour nous combler.
Il n’en demeure pas moins que cette idéologie était si puissante qu’elle a fait naître le retro-futurisme. Qu’on peut définir par des pratiques artistiques qui s’appuient sur une certaine représentation du futur, telle qu’on le percevait il y a quelques décennies. Le futur en somme tel qu’on se l’imaginait dans le passé. En jouant sur certains codes (l’un des plus emblématiques étant ce vert « martien »). Comme Blitz Motorcycle vers la rue Cardinet à Paris, qui re-design des motos sur le mode rétro-futuriste. Le retro-futurisme agit comme une nostalgie qui s’appuie sur des souvenirs puissants, ancrés en nous. Que le seul fait d’invoquer nous transporte dans une époque supposé bénie car associé à un monde où tout semblait plus simple.
Bien sûr, il n’en n’est rien. Car la mémoire a sa propre logique pour ne pas nous rendre fou. Elle nous fait croire à la cohérence de nos actions passées. Pour mieux nous inscrire dans le présent. Notre mémoire ré-écrit l’histoire en somme pour faire concorder nos pensées et nos actions. Là où cela devient compliqué, c’est quand on s’accroche à ce passé idéalisé qui écrit sans cesse un scénario rétro futuriste lié à notre fascination pour une certaine représentation du monde passé... certes innovante à une période mais devenue obsolète. Par exemple, la représentation des espaces publics, où la voiture individuelle domine tout, renvoie pour certains à un monde idéal, car associé à celui de leur enfance. A un agencement de l’espace public où ils ont leurs repères (fussent-ils imparfaits, ce n’est pas le problème). Y toucher c’est toucher à leur histoire personnelle, aux affects positifs qui y sont parfois associés (le camion du marchand de glace, le retour chez soi après l’école). La transition environnementale passera par là. Par la création de nouveaux affects positifs voués à remplacer ceux des générations précédentes. Qui engendreront à leur tour une nouvelle nostalgie. En mouvement toujours le futur est.