Tour de la Mer Baltique (étape 1) : Gdansk pour néo citadin plateformisé
Du 11 au 25 mars 2024, Ville Hybride se rend dans plusieurs villes autour de la mer Baltique : Gdansk , Vilnius, Tallin et Helsinki. Dans quel but ? Pour mieux comprendre les spécificités de ces villes à travers leur histoire et leur présent. Étape 1 : Gdansk (Pologne). Photo de la grue portuaire "Zuraw" édifiée en 1367, le long de la Motlawa (© Ville Hybride)
Une histoire mouvementée
Gdansk a une histoire récente pour le moins mouvementée. Dans les années 1970, elle est est le berceau du syndicat ouvrier des chantiers navals : Solidarnosc. De haute lutte, il fera chavirer dans les années 1980 le pouvoir communiste polonais en place depuis quarante ans. Premier pays libéré du joug de l'URSS, le syndicat longtemps dirigé par Lech Walesa, contribuera également à l’effondrement du régime soviétique (de nombreux Polonais considèrent que l'URSS a envahi légalement la Pologne par le biais du Traité de Yalta en 1945 qui acte les deux blocs, américain et soviétique). Le centre européen de la solidarité situé dans l'enceinte même du port relate cette période de manière très documentée. Orientée, parfois partiale mais étayée.
Auparavant, Gdansk est annexée par les Prussiens à la fin du 18e siècle jusqu’au Traité de Versailles en 1919. Gdansk s’appelait alors Dantzig. L’accès à la mer Baltique était stratégique. Les Prussiens créeront par la même occasion des chantiers navals que les Soviétiques vont considérablement développer à partir de 1945, jusqu’à leurs années phares dans les années 1960 (un navire en sortait tous les quinze jours). En 1919, Gdansk obtient le statut très spécifique de « ville libre » (Cité-Etat sous la haute protection de la Société des Nations, ex-ONU) : ni rattachée à l’Allemagne ni à la Pologne. Cela durera jusqu’en 1939 et l’invasion de la Pologne par la Wehrmacht. Ce statut unique n’est d’ailleurs pas sans rapport avec les révoltes ouvrières des chantiers navals à l’égard du pouvoir communiste, trente ans plus tard (42 morts en 1970).
Cette farouche volonté d'autonomie a aussi été attisée par une puissante ferveur catholique (Jean-Paul II, Polonais, a soufflé sur les braises de l’émancipation des peuples sous la domination de l’URSS, et particulièrement en Pologne oú sa visite en 1987 pour commémorer la mémoire du prêtre de Gdansk Jerzy Popieluszko, mort sous les coups de la police politique polonaise en 1984, fut un moment fort en symbole).
Aujourd’hui Gdansk est bien installée dans le giron des villes bordant la Baltique. Les chantiers navals existent toujours (au plus fort ils comptaient 17 000 ouvriers, une ville dans la ville). Le dynamisme économique se fait ressentir à chaque coin de rue.
La ville est structurée ainsi :
Aux touristes l’hyper centre, qui se refait une beauté année après année.
Aux autochtones les quartiers périphériques, oú on les retrouve dans les malls commerciaux et autre food hall.
La "copenhaguisation" de Gdansk
Gdansk n’échappe pas à la standardisation architecturale initiée par Copenhague. Ni à la standardisation culinaire centrée sur le hamburger et le kebap. On est à Gdansk comme on pourrait être dans une des villes qui compose l’arc Copenhaguien, s’étendant de Vienne à Oslo. Ça a bien sûr un côté rassurant. On trouve vite ses repères de néo citadin plateformisé. Allant du chauffeur Uber au kebap livré à domicile. Mais il y a aussi un côté effrayant quand on regarde le passé si riche de l’ancienne « ville libre » traversée par des influences culturelles et artistiques multiples. On aurait presque envie de dire : « tout ça pour ça ?".